Pour pouvoir bénéficier d’une exemption d’agrément bancaire, les MLC régulées doivent circuler dans un « réseau limité de personnes » ou permettre le paiement« d’un éventail limité de biens et services » (article L.511-7 II du CMF).
Soulignons en premier lieu que ces critères sont alternatifs. Il en résulte que si le réseau de personnes n’est pas limité, la condition légale d’exemption serait satisfaite si l’éventail de biens et service l’est et inversement.
L’obtention de l’exemption sur la base du critère de l’éventail limité de biens et services parait assez hypothétique pour des MLC, même si on ne peut l’exclure, notamment lorsque l’adhésion au réseau dépend du respect d’un ensemble de critères éthiques, sociaux ou liés au développement durable. Il reste que la fourniture au stade de la demande d’exemption, c’est-à-dire en principe, avant toute activité, d’une liste exhaustive des biens et services échangés dans le réseau n’est pas réalisable s’agissant d’une MLC.
Il convient donc de s’attacher au critère du réseau limité de personnes.
La loi ne précise pas ce qu’est un réseau limité de personnes. Cette appréciation est laissée à l’ACPR sous le contrôle des tribunaux. Rappelons que cette notion est issue du droit européen et qu’elle délimite la frontière entre les instruments de paiement harmonisés par le droit européen et ceux soumis à la seule compétence des législateurs nationaux. A propos du critère du réseau limité, le 5e considérant de la directive 2009/110 relative à la monnaie électronique (dont s’inspirent les termes du dossier d’exemption) apporte l’éclairage suivant : « il n’y a pas lieu d’exclure du champ d’application de la présente directive les instruments pouvant être utilisés pour réaliser des achats auprès de commerçants enregistrés dans une liste, lesdits instruments étant conçus, en principe, pour un réseau de prestataires de services qui ne cesse de s’étendre ». Par ailleurs, le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 24 avril 2013, a considéré qu’« un réseau peut être regardé comme conforme aux exigences de l’article L.521-3 du CMF, s’il satisfait à des critères objectifs, tels que, notamment, un périmètre géographique circonscrit, l’importance des liens capitalistiques entre ses membres, ou l’étroitesse de leurs relations commerciales, et que son caractère limité se trouve ainsi garanti ».
S’il n’est pas possible, d’après cette jurisprudence, de définir a priori la taille du réseau des MLC qui satisferait la condition légale d’un réseau limité - il semble que le pouvoir d’appréciation de l’ACPR doive rester assez discrétionnaire en la matière notamment au regard des caractéristiques de chaque MLC en cause - on retient principalement de cette jurisprudence, que la définition du réseau doit être objective. Dans la mesure où les MLC cherchent à relier par l’instrument monétaire une communauté d’utilisateurs ancrée le plus souvent sur un territoire, sans limiter a priori la diversité des biens et services échangés, le critère objectif qui semble le plus pertinent pour les MLC est le critère géographique. Selon cette interprétation, un émetteur de MLC ne pourrait pas prévoir dans sa charte d’utilisation d’agréer des accepteurs en dehors du territoire défini, même à titre exceptionnel et pour une raison légitime appréciée librement par lui (telle que l’absence d’offre similaire dans le territoire défini). Cela ne s’opposerait pas en revanche à l’augmentation progressive du nombre d’adhérents au sein du territoire circonscrit (le territoire lui-même ne s’étend pas). On ne peut que recommander aux émetteurs de rédiger avec soin les critères d’inclusion au réseau pour les rendre aussi objectifs que possible, même si une telle objectivation n’est pas conforme à l’esprit des MLC et s’harmonise difficilement avec la réalité économique et humaine qui sous-tendent le réseau des MLC.